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Lecture, Justice et S-prixCritiK
Quand la littérature rencontre la réalité d’un tribunal
Dans le cadre du prix S-prixCritik, prix littéraire local inter-établissements développé par les professeurs documentalistes et les bibliothécaires de Grand Paris Sud, les élèves de plusieurs classes du lycée ont lu « Coupable ? », rencontré son auteur, visité le tribunal de Melun et se préparent à rejouer un procès fictif dans une vraie salle d’assises.

Le 11 avril 2025, plusieurs classes du lycée Antonin Carême ont vécu une expérience rare, une immersion dans le monde de la justice, au tribunal de Melun. Cette sortie fait partie d’un projet pédagogique plus vaste, mené tout au long de l’année scolaire, qui mêle littérature, réflexion citoyenne et simulation de procès.
📖 Un prix littéraire au cœur des échanges
Les classes de 2GATL, 1CAP2P et 1CAP2HCR participent cette année au prix S-prixCritik. celui-ci vise à promouvoir la lecture chez les jeunes, en les rendant jurés d’une sélection de huit romans jeunesse.
Parmi ces ouvrages, « Coupable ? » d’Yves-Marie Clément a retenu une attention particulière. Ce roman met en scène le procès fictif d’Elona Prévoteau, accusée de complicité dans un crime raciste ayant entraîné la mort de Mehdi Kateb.
La particularité de ce livre ? Le verdict n’est pas donné. Chaque lecteur est invité à se forger sa propre conviction, comme un véritable juré.
Pour renforcer l’engagement des élèves, diverses activités ont été mises en place, parmi celles-ci, la rencontre avec l’auteur le 1er avril, des sessions de discussions collectives, mais aussi un travail d’interprétation en vue d’une reconstitution du procès.
⚖️ Ancrer la fiction dans la réalité
L’immersion au tribunal le 11 avril, devait aider les élèves à mieux comprendre les enjeux soulevés dans le roman, à confronter la fiction à la réalité de la justice et à enrichir leur réflexion autour du procès. La rencontre avec des professionnels du droit, leur a permis de mieux appréhender le déroulement d’une audience et de découvrir les différents espaces du tribunal, en lien direct avec l’univers du livre.
🎤 Ce qu’ils ont demandé, ce qu’ils ont appris
Les professionnels du droit ont répondu à plusieurs questions préparées par les élèves, dont les suivantes :
- Est-ce qu’il y a des affaires que vous n’aimez pas plaider ?
Un magistrat avocat a expliqué que les litiges de voisinage sont souvent les plus délicats à traiter, non pas à cause de leur gravité, mais parce qu’ils peuvent entraîner les parties dans des conflits interminables. Selon lui, ces affaires gagneraient à être résolues par la médiation, plutôt que devant les tribunaux.
- Est-ce dur de défendre un criminel ?
Ce même magistrat a précisé qu’on ne peut pas parler de criminel, tant qu’aucune décision de justice n’a été rendue. Toute personne est présumée innocente tant que sa culpabilité n’a pas été reconnue par un jugement, selon le principe de la présomption d’innocence. Il ne s’agit pas de défendre une personne comme si elle était innocente ou coupable d’avance, mais de garantir que les faits soient examinés objectivement.
L’important n’étant pas d’obtenir une condamnation à tout prix, mais de comprendre les raisons du passage à l’acte, de garantir que la vérité soit établie dans le respect de la procédure.
- Est-ce que vous pensez qu’Elona Prévoteau est coupable ? Comment juger sans preuve ou avec peu de preuves ?
Les professionnels n’ont pas apporté de réponse tranchée, mais ont proposé des pistes de réflexion pour aider les élèves à se mettre dans la peau des jurés chargés de juger Élona pour complicité. Ils ont expliqué que pour se prononcer, ils doivent s’appuyer uniquement sur les éléments concrets à leur disposition, à savoir les faits, les résultats d’expertises, les témoignages recoupés. Et comme le doute doit toujours bénéficier à l’accusé ...
Les élèves ont découvert comment les jurés d’assises sont désignés et comment se déroule la délibération pour décider de la culpabilité ou de l’innocence d’un accusé.
- Quelle a été l’affaire la plus marquante ?
On a expliqué que les dossiers impliquant des enfants, sont parmi les plus difficiles à instruire ou à juger. Ces affaires souvent sensibles, demandent une vigilance particulière, tant sur le plan juridique qu’humain.

Mais ce qui a le plus étonné les élèves, c’est d’apprendre qu’un mineur peut être incarcéré, depuis la loi du 26 février 2021, qui a créé le Code de la justice pénale des mineurs (CJPM), permettant notamment, de juger un mineur dès 13 ans, dans certains cas exceptionnels, selon la gravité des faits reprochés. Cette information a suscité de nombreuses réactions, les représentations des élèves sur la justice, ont été quelque peu bousculées. Cela a conduit à un temps d’échange plus large sur la complexité des décisions judiciaires et la responsabilité que cela implique pour ceux qui les rendent.
Les élèves ont également visité une salle de cour d’assises connectée, équipée pour les visioconférences, pour faciliter le travail de la justice et permettre d’échanger à distance avec des experts souvent très occupés, ou de faire témoigner des personnes éloignées géographiquement.
🎭 Rendez-vous le 23 mai ?
Le projet se poursuivra le 23 mai, lors de la Journée Nationale de l’Accès au Droit. Quinze élèves incarneront les différents rôles d’un procès ; juge, avocats, jurés, prévenus, dans une véritable salle d’assises du tribunal de Melun.
Les élèves de 1CAP2P prépareront également une interview fictive des personnages du roman, apportant un regard original et sensible sur l’intrigue.
🧬 Une expérience citoyenne
Porté par Mme Vallée, enseignante-documentaliste, Mme Braud, Mme Gutierrez et M. Vernez, enseignants de lettres-histoire, ce projet vise à développer chez les élèves leur esprit critique, leur capacité à argumenter, à se positionner dans un cadre citoyen, et à découvrir des métiers souvent méconnus.
Les retours sont très positifs. Beaucoup de curiosité, de l’implication, et une réelle volonté de comprendre le rôle de la justice dans la société. Ce projet, à la fois exigeant et très formateur, a même contribué à renforcer une ou deux vocations pour cet univers professionnel.
L’essentiel en images

Salle de la cour d’assises

Vue panoramique de la cour d’assises
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